La Ville de Namur peut-elle peser sur le prix de l'électricité des Namurois ?
17/11/2016 19:00
Si les coûts de l'électricité sont stables, les prix du transport et de la distribution ont eux augmenté respectivement de 8% et 16%. Le PS, par la voix de José Damilot, demande, qu'avec une dividende de 3,5 millions €, la Ville de Namur pèse sur les décisions futures en matière tarifaire.
Découvrez l'intervention de José Damilot en Conseil communal du 17 novembre 2016:
L’électricité est avec l’eau un des principaux produits de première nécessité.
Pas étonnant que les médias traitent souvent de ce sujet.
Ces dernières semaines, on a évoqué les dangers des centrales nucléaires, les risques de pénurie en hiver et, plus concrètement pour les consommateurs, une éventuelle flambée des prix.
Hier, le hasard fait parfois bien les choses, un journal économique et financier a titré : "Vers une uniformisation des tarifs de gaz et d’électricité en Wallonie. »
C’est évidemment la question des tarifs que je compte aborder ce soir parce que, de plus en plus, l’électricité pèse sur le budget des ménages et parce que la Ville, certes d’une manière indirecte, est impliquée dans ce secteur d’activités.
D’abord, je ne reviendrai pas sur le yo-yo de la tva sur l’électricité repassée à 21% depuis le 1er septembre 2015.
Pour faire bref, en dehors de la tva, il y a 3 postes importants sur une facture d’électricité pour un consommateur lambda.
Il y a les coûts inhérents au produit consommé, le nombre de kWh et cela relève d’Engie, Lampiris, Luminus…
Il y a les frais de transport qui relèvent d’Elia, en quelque sorte l’équivalent d’INFRABEL dans les chemins de fer et qui sont identiques sur tout le territoire wallon.
Et il y a les frais de distribution qui relèvent du GRD (Gestionnaire de Réseau de distribution) en l’occurrence pour nous, Ores Namur.
Ce qui ressort au premier coup d’œil d’une facture d’électricité, c’est que le produit (l’électricité) coûte beaucoup moins que ce qu’on pourrait appeler les frais de logistique (transport et distribution).
Hors TVA, le coût de l’électricité représente 30 % de la facture.
Le coût du transport représente 15 %
Le coût de distribution, lui, représente 38 %.
Je ne suis pas qualifié pour apprécier le poids relatif de ces 3 postes.
Par contre, je me pose des questions sur l’évolution de leur coût respectif, particulièrement au cours des 2 dernières années.
Ainsi, le prix de l’électricité est resté stable, j’imagine, que l’explication se trouve dans la concurrence que se font les producteurs sur le marché.
Le prix du transport, lui, a augmenté de 8 %, c’est sans doute l’effet de l’obligation imposée à Elia de racheter les certificats verts.
Quant aux prix de distribution, sur la même période, ils ont augmenté de 16 % à Namur, parfois plus, parfois moins ailleurs et que nous attendons les nouveaux tarifs qui seront d’application le 1er janvier 2017, sans doute à la hausse.
Pour ce poste, je n’ai qu’une hypothèse sur laquelle je reviendrai dans un instant.
Je me suis d’abord souvenu que, il y a exactement 3 ans, en Commission du Bourgmestre, un représentant d’Ores était venu nous expliquer le projet de fusion des GRD (Gestionnaires des Réseaux de Distribution).
Que contenait le document qui nous avait été remis ?
Il y avait le souci de créer une structure unique qui soit un interlocuteur de poids à l’égard des marchés financiers.
Il était question de réduire le nombre de mandats, ce qui devait conduire à des économies.
Il y avait la volonté de préserver les dividendes des communes, principaux actionnaires.
Il y avait aussi l’engagement de garantir la neutralité patrimoniale pour les associés ce qui impliquait, je cite, « qu’Ores continuera à appliquer les tarifs par secteur TELS QU’ACTUELLEMENT EN VIGUEUR ».
Est-ce que les engagements sont respectés ?
Je pense qu’effectivement, on a réduit le nombre de mandats rémunérés.
Sur la question des dividendes, je pense que, pour la ville de Namur, il n’y a pas de raison de se plaindre. En 2014, on percevait 3,417 millions, la MB 2 de 2016 nous annonce 3,458 millions, soit une augmentation de 1% en 2 ans.
Par contre, les engagements vis-à-vis des consommateurs, eux, ne sont absolument pas respectés.
16 % d’augmentation en 1 an, cela n’a rien à voir avec l’inflation et je répète que, sans doute au 1er janvier, il y aura une nouvelle augmentation.
Si je compare Ores Namur avec les autres Ores wallons, qu’est-ce que j’observe ?
1) Les tarifs d’Ores Namur sont moins élevés que ceux de la province de Luxembourg et de la région de Verviers, 2 régions sans doute handicapées par une plus grande dispersion de l’habitat.
Par contre, ils sont bien plus élevés que dans le Brabant Wallon et dans le Hainaut.
2) Malgré la fusion des GRD, chaque Ores a gardé son autonomie tarifaire.
C’est ce qui ressort de l’évolution tarifaire entre le 1er janvier 2015 et le 1er janvier 2016. Certains Ores ont augmenté leur tarif de 20 %, d’autres de 9 %. Pour rappel, à Namur, c’est 16 %.
En tout état de cause, la facture d’électricité augmente, je serais tenté de dire exclusivement à cause des frais de distribution et ce, au mépris d’engagements pris au moment de la fusion des GRD.
Pourquoi ?
J’ai cherché les raisons de cette augmentation. Elle ne figure évidemment pas sur la facture. Pour la transparence, on repassera.
Pour moi, il n’y a qu’une explication.
Fin 2014, le Gouvernement fédéral a décidé d’abroger le régime d’exclusion des Intercommunales de l’impôt des sociétés.
Selon le site de la CWAPE, cela concerne les intercommunales de distribution de l’électricité.
Celles-ci se sont donc trouvées avec une charge nouvelle qui, l’actualité nous le rappelle tristement chaque jour, ne pouvait pas pénaliser les dividendes des actionnaires.
On l’a vu tantôt, le dividende Ores de la ville de Namur n’a pas diminué.
Il fallait bien que quelqu’un supporte la charge de cet impôt nouveau et on a décidé comme d’habitude que ce seraient les consommateurs.
Si je suis sensible aux rentrées financières des communes et de Namur en particulier, 3,5 millions, c’est pas rien, c’est 10% de la recette Ipp, je trouve que le consommateur est une nouvelle fois le dindon exclusif d’une mauvaise farce.
Dans ce pays, quand un niveau de pouvoir prend une décision qui impacte un autre niveau de pouvoir, on a le sentiment que cela se termine toujours par la transmission de la facture aux consommateurs.
Monsieur le Président,
Je veux croire que la Ville, avec un dividende de 3,5 millions est un actionnaire qui compte au sein d’Ores.
Je souhaiterais donc qu’elle pèse sur les décisions futures en matière tarifaire.
Et des occasions se présenteront.
D’abord, ce sont les GRD - dont Ores Namur - qui proposent leurs grilles tarifaires à la CWAPE.
Pour l’instant, on est dans une période régulatoire dite transitoire entre la régulation fédérale et la régulation régionale.
Mais, à partir du 1.1.2018, la CWAPE se fixera des objectifs stratégiques pour la période 2018 – 2022, soit pour 5 ans.
La CWAPE souhaite revoir la structure et la présentation des tarifs dans un souci d’uniformisation.
Dans l’article du journal financier auquel je faisais allusion, le président de la CWAPE insistait sur cette uniformisation en veillant à ce que les tarifs incitent les GRD à améliorer leur performance.
Est-ce que performance veut dire « à meilleur prix » ?
Je n’en suis pas convaincu.
Hier toujours, un autre hasard, j’ai reçu le plan stratégique 2015 – 2020 d’Ores dans son état d’avancement novembre 2016.
On y apprend que le plan OPTIMUM, à l’horizon 2022, devrait permettre une économie de 57 millions d’euros, soit 10 % du budget d’Ores dont 20 millions seront déjà réalisés fin de cette année.
Je pensais que le consommateur serait un des bénéficiaires de cette rationalisation.
Rien dans le plan stratégique ne permet de l’affirmer.
Personnellement, je trouve que ces gains doivent profiter à tous, de façon équilibrée, aux actionnaires publics comme les villes mais aus+si aux consommateurs.
Je le répète, l’électricité pèse de plus en plus dans le budget des ménages.
Sans même parler du retour de la tva à 21% et de toutes les incertitudes qui entourent ce secteur, il y a des postes de la facture qui explosent.
Je me permets donc de demander à la Ville, là où elle peut faire entendre sa voix, c'est-à-dire dans l’intercommunale de distribution d’électricité de prôner aussi la prise en compte des intérêts de ses habitants.
José DAMILOT
Conseiller communal